À l’heure où la(les) région(s) développe(ent) de nouveaux pôles de compétences sur la question, le design s’affirme toujours plus comme l’outil et le signe d’une réelle vitalité économique.
Pour Stéphane Vial, maître de conférences à l’Université de Nîmes, il concrétise de nouvelles potentialités industrielles, humaines ou sociétales. C’est dire l’urgence qu’il y a de s’en saisir, du côté des entrepreneurs et des décideurs.
(…) Bien que la notion remonte à la Renaissance et bien qu’il s’enracine dans plusieurs mouvements créatifs de la fin du XIXe siècle, le design proprement dit est apparu au XXe siècle, d’abord sous la forme du design industriel. Pendant les Trente Glorieuses, ce dernier a connu un véritable âge d’or, celui de la société de consommation de masse, en transformant de manière exceptionnelle la qualité de la production industrielle, grâce à l’adéquation de la forme et de la fonction, principe fondateur de l’« esthétique industrielle » et de la beauté utile (de nos jours, Apple en est le digne héritier). Mais la crise écologique des années 1970 (la pollution se décide à la conception) et la crise morale des années 1980-90 (le design industriel est asservi au marketing) ont conduit les designers à se réinventer. Ainsi sont apparues de nouvelles formes de design, centrées sur les humains plutôt que sur les produits, comme l’écoconception, le design centré utilisateur, le design d’interaction, le design de services ou le design social.
Ce dernier, le design social, est l’une des spécialités de l’Université de Nîmes (…). Son idée est simple : la finalité du processus de design ne doit pas être prioritairement marchande mais doit être subordonnée à une finalité supérieure, à savoir : le bien commun (design for the greater good). Entrent ainsi dans la catégorie du design social des pratiques telles que le design durable, le design de services, le design des politiques publiques et, plus généralement, toutes les formes de design qui favorisent « l’innovation sociale », dont l’objet est (d’après l’OCDE) le bien-être des individus et des communautés. Cela inclut l’innovation numérique au service des citoyens ou l’innovation culturelle au service des territoires (…).
Si le design industriel n’est pas mort, la notion de design ne s’y limite plus. Désormais, le design est une discipline capable de s’attaquer à tous les problèmes de société et, ce faisant, de contribuer à améliorer l’habitabilité du monde dans toutes ses dimensions. C’est pourquoi les entreprises et les institutions qui ne l’ont pas encore fait gagneraient à intégrer des designers dans leur organigramme ou à subventionner des projets de recherche en design, que ce soit à des fins d’innovation sociale, d’innovation économique ou d’innovation technologique. Car, depuis ses origines, le design s’est toujours préoccupé d’humaniser le monde, que ce soit en humanisant l’industrie (…), en humanisant la croissance (…), en humanisant les technologies numériques (…), en humanisant la relation aux parties prenantes (…), en humanisant l’offre et l’expérience des produits (…), ou en œuvrant pour le bien commun et l’intérêt général (…).
Vous n’avez encore jamais travaillé avec un designer sur votre offre, vos produits, vos services, vos missions ? Vous n’avez jamais participé à un atelier de conception créative ? Vous n’avez jamais lâché votre tableur préféré pour des post-it ? Vous n’avez jamais essayé le co-working ? Le prototypage de vos projets ? La conception participative ? Mais qu’attendez-vous ?
Bruno Latour le dit très bien : « Design est l’un des termes qui ont remplacé le mot révolution ».
Stéphane Vial est maître de conférences à l’Université de Nîmes et l’auteur de Le design, PUF, collection « Que sais-je ? », paru en janvier 2015.