Après Lille 2004, Capitale européenne de la culture, voici Lille Métropole 2020, Capitale mondiale du design. En mars dernier, la Métropole européenne de Lille (MEL) avait déposé une candidature auprès de l’Organisation mondiale du design (WDO) pour concourir au titre de World Design Capital. Tous les deux ans, la WDO récompense ainsi une ville pour son utilisation efficace du design dans sa politique économique, sociale et culturelle.
Lille Métropole, parvenue en finale face à la ville de Sydney en Australie, a été proclamée gagnante, samedi 14 octobre à la mi-journée, à Turin (Italie). « Nous sommes prêts à porter une année d’événements dédiés au design en 2020, mais nous sommes surtout prêts à vous démontrer notre capacité à explorer une démarche design à une échelle jamais déployée », estimait il y a encore quelques jours Damien Castelain, le président de la MEL.
C’est lui, maire d’une petite commune de 900 habitants dans le Nord, Péronne-en-Mélantois, devenu en 2014 le président de l’une des plus grandes métropoles françaises, qui a voulu impliquer dans cette aventure, chercheurs, architectes, designers, mais aussi les 2,1 millions d’habitants. Avec une ambition : que la région Hauts-de-France puisse incarner la référence mondiale en matière d’évolution culturelle, sociale et environnementale par le design. Il souhaite que les 90 villes de la Métropole se réinventent par le biais de cette discipline.
Une terre d’entrepreneurs
Si la Métropole lilloise a pu se distinguer, c’est avant tout grâce à un écosystème très dynamique d’acteurs tels que les entreprises, les centres de formation et de recherche, les lieux culturels, les collectivités et les citoyens. « C’est la force de notre territoire, estime Caroline Naphegyi, directrice de Lille Design, association de promotion et de développement du design dans la région. Les gens sont là. Il suffit de se souvenir de Lille 2004, de l’engouement. Et il existe énormément de clubs d’entreprises, très structurés, qui s’engagent. »
Le Nord est une terre d’entrepreneurs et de designers, à l’image d’entreprises innovantes comme Decathlon et Ankama, ou capables de se réinventer, comme La Redoute. La candidature lilloise a également mis en avant les success-stories du design industriel, comme les billards Toulet à Bondues, les manufactures Catry à Roncq, ou l’un des champions du textile technique, Dickson, à Wasquehal. « Dickson a été créé à Dunkerque en 1836 et aujourd’hui, nous sommes le spécialiste de la toile technique outdoor », explique Mélanie Bernard, design manager. Au sein de l’entreprise nordiste, composée de six cents salariés, une équipe de huit designers planche au quotidien sur les usages de ces toiles, pour améliorer les conditions de vie de ses utilisateurs. « Le design, c’est répondre à des usages et à des concepts, insiste Mme Bernard. On ne s’arrête pas qu’à des couleurs et à des motifs. »
Un héritage transformé
Accompagner et améliorer le quotidien, c’est ce qui ressort de la candidature de Lille. « Au fondement de notre candidature réside la capacité de notre territoire, de ses habitants et acteurs, à transformer son futur, aime répéter M. Castelain. Un territoire pionnier et animé par la volonté de se transformer et de requalifier son héritage. »
Ainsi l’ancienne piscine de Roubaix est devenue l’un des plus beaux musées de France, l’immense bâtiment lillois de la filature Le Blan-Lafont s’est métamorphosé en temple des nouvelles technologies (EuraTechnologies) et la friche de la brasserie tourquennoise Terken a laissé place au Centre européen des textiles innovants (CETI), emblème du renouveau du textile dans le nord de la France. « Les reconversions de sites industriels en sites d’excellence, comme EuraTechnologies ou Fives Cail à Lille, sont avant tout des reconversions d’ordre économique », note par ailleurs Mme Naphegyi.
La nouvelle génération
En matière de design, Lille peut aussi s’appuyer sur la nouvelle génération, à l’image de Gary Berche et de Natacha Kopec. A tout juste 30 ans, ces deux Ch’tis sont partis aux Beaux-Arts de Milan après leurs études roubaisiennes à l’Ecole supérieure des arts appliqués et du textile (Esaat). « On a voulu créer notre marque, explique Gary Berche, originaire de Sains-en-Gohelle (Pas-de-Calais), dans le bassin minier. On a gagné un tremplin design et bénéficié des services d’un incubateur. » Depuis, le binôme a créé sa petite entreprise de luminaires, KNGB. Des collections de 100 exemplaires maximum, réalisées à partir des talents des artisans de la région : ferronniers, tourneurs sur bois, tanneurs. « On revient à la production locale en mettant en avant les savoir-faire des petits artisans. »
Lors du passage de la délégation du jury de la WDO, la maire de Lille, Martine Aubry, avait insisté sur sa vision du design : « On “design” la ville pour mieux vivre ensemble, pour respecter les gens, pour qu’ils retrouvent la fierté d’eux-mêmes. » Après la ville de Mexico, élue Capitale mondiale pour 2018, la Métropole lilloise a désormais deux ans pour préparer la mise en œuvre de son programme d’événements.
Auteure : Laurie Moniez pour Le Monde
Pertinence et intérêt de l’article selon designer.s !
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