Qui l’aurait cru ! Hier encore vécues comme rustiques ou appartenant à un passé disparu, les fibres végétales sont aujourd’hui moteur d’innovation. Et qui eut pensé il y a quelques années seulement, qu’elles pourraient être une réelle alternative aux ressources fossiles !
Même si le monde a beaucoup changé, des ressources naturelles d’autrefois retrouvent aujourd’hui une jeunesse vigoureuse grâce à de nouvelles alliances. Il en est ainsi des fibres de lin et de chanvre européens qui donnent depuis quelques temps l’impulsion à une nouvelle génération de produits composites apportant une vraie valeur ajoutée aux entreprises. Leurs atouts : une matière première d’origine renouvelable* associé à un coût de production et des performances mécaniques fiables.
Ces avantages gagnent la confiance des industriels et anticipent la demande des consommateurs de plus en plus responsabilisés vis-à-vis du Développement Durable. Fibres d’innovation, le lin & chanvre européens se développent désormais bien au-delà de leurs champs traditionnels d’application textile pour l’habillement et la décoration d’intérieur. Elles investissent des secteurs industriels diversifiés couvrant un large spectre, des loisirs à l’aéronautique.
L’extension des applications des fibres de lin et de chanvre dans les composites s’explique essentiellement par la spécificité de leurs performances : des avantages en termes de faible densité (1,5 vs 2,54 pour la fibre de verre) adjointe à une rigidité spécifique, une résistance performante au choc, à la torsion et au cisaillement, d’absorption des vibrations et de bonnes propriétés acoustiques ou thermiques. S’y ajoutent des performances liées à l’amélioration de fin de vie des composants en par l’optimisation du recyclage par incinération – avec 0 résidu – ainsi qu’une neutralité carbone, voire une biodégradabilité à 100% pour les composites à matrice organique les plus innovants.
Dans le secteur du Sport et Loisir, ce sont aujourd’hui plusieurs familles de produits, de la glisse aux sports de raquette en passant par le cyclisme qui ont franchi le pas. Leurs fabricants – français ou internationaux – apprécient leur qualité de forte absorption des vibrations qui procurent un meilleur confort et une meilleure précision d’usage aux sportifs amateurs comme aux professionnels.
Ainsi, le coréeen WIAWIS commercialise aujourd’hui une nouvelle génération d’arc de compétition dotée un composite alliant nano carbone et fibres de lin pour répondre aux besoins de l’archer, lequel recherche une bonne rigidité de la poignée et une bonne souplesse et rapidité des branches pour augmenter sa précision. Or, ici l’optimisation obtenue, grâce à l’intégration d’un voile de lin préimprégné de résine epoxy avec une stratification de tissus en nano carbone, est de 40% tant pour la stabilité du mouvement que pour la réduction des vibrations. Pour ceux qui pratiquent le tennis ou le tennis de table, ce sont aujourd’hui sept modèles de raquettes de tennis et un modèle de raquette de tennis de table qui sont commercialisés dans les points de vente du Groupe DECATHLON, très innovant dans sa démarche de conception.
La marque ARTENGO a privilégié le lin pour son double atout légèreté/amorti des vibrations, en l’associant soit au bois multiplis pour les raquettes de tennis de table, soit aux fibres de carbone ou verre dans le cas des raquettes de tennis. Le secteur du ski n’est pas en reste.
Entre ultra-technicité et savoir-faire artisanaux, EARLYBIRD ou AKONITE cherchent à intégrer un maximum de ressources renouvelables plus aisément recyclables. Aux bois traditionnels est adjoint un composite renforcé de lin : l’absorption optimisée des vibrations permet une sollicitation moindre des muscles, et donc là aussi un plus grand confort – sur la neige cette fois -.
Ces atouts s’inscrivent dans une offre large distribuée par de nombreuses marques spécialistes et internationales comprenant notamment Rossignol, Salomon, Wedze, Movement, Stoeckli, Faction, Icelantic, Whitedots. Quant aux bâtons, ceux développés par KANG en composite de lin disposent d’une légèreté, d’une rigidité et d’une résistance comparable à celle d’un bâton de ski en fibre de carbone tout en bénéficiant d’une résistance aux chocs accrue. Parce qu’exercés en extérieur, les fabricants des sports de glisse sont tout aussi attentifs à une démarche respectueuse de l’environnement. Leurs ambitions d’éco-conception se doivent néanmoins d’être synchrones avec les performances techniques attendues par les utilisateurs. Ce sport mettant à contribution l’ensemble des muscles, la maniabilité qu’accroît le lin est un avantage de taille pour des courses qui peuvent couvrir des distances de 30 à 60 km. Les acteurs du marché cherchent à répondre à ces besoins exigeants et des marques comme BIC SPORT viennent compléter l’offre déjà existante.
Dans le domaine du cyclisme, un des loisirs préférés des Français, on retrouve cette même implication. Celle-ci est particulièrement mise en avant par l’entreprise vosgienne IN’BÔ qui privilégie l’utilisation de ressources renouvelables de proximité pour les cadres de vélo (ou pour la structure d’un skateboard) par en substitution aux fibres de verre ou de carbone.
Le développement de produits de pointe pour lesquels les agro-matériaux offrent des caractéristiques techniques supérieures facilite la commercialisation de produits de loisir grand public, qu’il s’agisse du casque de protection pour VTT développé par URGE BIKEPRODUCTS compte-tenu de son usage en compétition ou des casques de vélos urbains Veggie-Helmets d’ EGIDE, lesquels associent une grande légèreté et une meilleure ventilation grâce à la capacité des fibres naturelles cellulosiques d’absorber l’humidité (ce qui facilite la régulation du micro-environnement entre le casque et la peau).
Dans le domaine du Sport et Loisir comme dans d’autres secteurs, l’innovation végétale avance à grandes enjambées. Dépassant l’éventuel alibi de marketing « green », l’offre de produits novateurs, fiables et performants intégrant ces composites a considérablement évolué ! Tant mieux pour le Made in Local, même si beaucoup reste encore à faire !
* Leur culture ne demande pas d’irrigation, peu d’intrants, la production est peu énergivore, le procédé de transformation est naturel et mécanique par le rouissage-treillage, l’ émission de CO2 est presque nulle, la compensation CO2/an est de 16T/ha, en fin de vie le bilan est de Zéro déchet, de l’ensemble des coproduits de la plante est valorisé, le tout étant 100 % Recyclable ou compostable.
Author : Brigitte KAHANE, fondatrice de l’Observatoire de l’ecodesign
Sources :ACV chanvre – Ministère de l’Agriculture et de la Pêche 2005/ ACV Lin et Eco profil – normes ISO 14040 et 14044 INRA.