Signé Benjamin Loyauté, le projet « Hypervital » aura nécessité des mois et des mois de recherches. Riche en projets et objets d’hier, d’aujourd’hui, et de demain, c’est une exposition qu’il est vital d’aller voir.
De grandes salles aux murs sombres, des objets, projets, présentés sous vitrine tels des œuvres d’art, une scénographie soignée avec des cartels pédagogiques, des vidéos notices d’emploi, l’exposition « Hypervital » a tout pour accrocher le visiteur. Elle est intelligente. Passionnante.
Analyse d’un monde qui ne tourne plus rond
Elle élargit nos esprits, informe, questionne, sur nos modèles de société, notre monde. Elle réconcilie aussi les non-initiés ou les hermétiques au design avec cette discipline qui ne se résume pas à l’unique création de chaises, lampes, et autres objets de consommation. On est loin, très loin, là, de cette philosophie.
« Il y a deux lectures dans cette exposition, propose Benjamin Loyauté, commissaire d’Hypervital et co-commissaire général de cette Biennale. Devons-nous être hypervitaux par quelque chose qui est construit ? C’est-à-dire que dès qu’on va mal, on se soigne par la consommation d’un vêtement, d’un médicament qui ne sera pas curatif mais qui entraînera une mise en léthargie. L’autre lecture, c’est que dans « Hypervital », il y a le mot vie. Est-ce qu’être hypervital, ce n’est pas prendre en compte ce que nous sommes et où nous allons. Faut-il peut-être voir en face une réalité qui peut s’avérer crue ? »
Vers une autre vie de designer
Dans cette exposition, où se côtoient objets d’hier, d’aujourd’hui, et de demain, le design dépollue avec ce drone bateau, qui filtre les plastiques accumulés dans les océans. Répare les corps avec ce genou motorisé ou encore cette main artificielle. Protège l’environnement avec ce filet de pêche qui laisse échapper les petits poissons. Fait du bien aux populations démunies d’Afrique avec ce cuiseur solaire ou ce purificateur d’eau. « Je ne montre que des projets positifs, des solutions. Les designers sont là presque vitalistes, ils essaient de faire évoluer les choses. » Et de nous en faire comprendre certaines, comme ces trois couverts qui permettront de s’alimenter de lumière. « Ça nous alerte sur le fait que nous allons devoir peut-être nous alimenter autrement à l’avenir. Peut-être consommons-nous trop ? » Peut-être avons-nous aussi oublié l’essentiel, cette « légalité naturelle », qui inspire la dernière salle de l’exposition. « C’est notre prise de conscience, résume Benjamin Loyauté. Il faut avancer autrement en essayant d’avoir une prise de conscience sur notre passé, et en rapport avec notre environnement. Nous sommes tous responsables de la direction à prendre. Les designers essaient d’y répondre, d’alerter sur les problèmes de notre société. » C’est un peu ce que Benjamin Loyauté a fait là avec ce travail. « Après, je ne vois pas trop ce que je peux faire. Je ne prends plus de plaisir à exposer du mobilier ou des objets. Je vais peut-être passer à une autre vie. » Sans doute plus engagée.
« Hypervital », à la Platine, à la Cité du design à Saint-Etienne. Visible pendant six mois.
Auteur : Muriel Catalano pour Le progrès